En août 2025, la Belgique a pris une mesure audacieuse en réformant sa politique d’asile. À partir du 4 août, les personnes ayant déjà obtenu un statut de protection dans d’autres pays de l’Union européenne ne pourront plus prétendre à une place dans les centres d’accueil belges. Cette décision, prise dans le cadre de « mesures de crise », vise à lutter contre le « shopping d’asile » – la pratique consistant à demander l’asile dans plusieurs pays. La ministre de l’Asile et de la Migration, Annelien Van Bossuyt, a souligné que l’objectif est de soulager un système surchargé et de rendre la Belgique moins attrayante pour la migration secondaire.
Cette politique a déclenché de vifs débats. Les critiques la jugent inhumaine, mettant en garde contre une hausse du sans-abrisme parmi les réfugiés, tandis que ses partisans y voient un moyen de reprendre le contrôle des flux migratoires. Cet article analyse les raisons, les détails et les conséquences de cette nouvelle politique, ainsi que son impact sur les réfugiés, la société et la réputation internationale de la Belgique.
Raisons du durcissement de la politique migratoire
La Belgique fait face depuis plusieurs années à une surcharge de son système d’accueil des réfugiés. En 2024, le pays a enregistré environ 40 000 demandes d’asile, dont 15 000 émanaient de personnes déjà enregistrées ou ayant obtenu une protection dans d’autres pays de l’UE. Cela a exercé une pression énorme sur Fedasil, l’agence chargée de l’accueil des réfugiés. L’an dernier, les centres d’accueil étaient remplis à 94 %, avec un total de 36 077 places, mais des milliers de personnes, notamment des hommes célibataires, restaient sans logement, attendant jusqu’à 3 à 4 mois.
La pression politique a également joué un rôle clé. Le gouvernement de centre-droit, dirigé par le Premier ministre Bart De Wever (parti nationaliste flamand N-VA), a fait du durcissement de la politique migratoire une priorité, visant à créer « le système le plus strict d’Europe ». Plus de 8 000 poursuites judiciaires contre Fedasil pour non-fourniture de logement ont renforcé la nécessité de réformes. En conséquence, le gouvernement a restreint l’accès aux centres pour ceux ayant déjà une protection dans d’autres pays de l’UE afin de réduire la migration secondaire et alléger la pression sur les infrastructures.
Détails de la nouvelle politique
Depuis le 4 août 2025, la Belgique a introduit des changements pour rationaliser son système d’asile et réduire le nombre de demandes. Les principales mesures incluent le refus d’hébergement aux réfugiés ayant un statut de protection dans un autre pays de l’UE et l’accélération du traitement des demandes de ceux ayant déjà déposé une demande ailleurs. Le Commissariat général aux réfugiés et aux apatrides (CGVS) rend désormais des décisions plus rapides sur l’inadmissibilité de ces demandes, tandis que le règlement de Dublin est appliqué plus strictement pour renvoyer les migrants dans leur pays d’enregistrement initial.
La ministre Van Bossuyt a également lancé des campagnes d’information via YouTube et WhatsApp pour dissuader les réfugiés potentiels de venir en Belgique. Ces campagnes mettent en avant la surpopulation des centres, des règles strictes et des opportunités limitées pour ceux déjà protégés ailleurs. Selon les autorités, ces mesures permettront de concentrer les ressources sur ceux qui ont véritablement besoin d’asile et de réduire l’attrait de la Belgique pour la migration secondaire.
Impacts sur les réfugiés et la société
La nouvelle politique transforme déjà la situation en Belgique, avec des conséquences humanitaires et sociales. Pour les réfugiés, le refus d’accès aux centres d’accueil accroît le risque de sans-abrisme, en particulier pour les hommes célibataires, qui faisaient déjà face à des restrictions. Une application plus stricte du règlement de Dublin pourrait renvoyer de nombreux migrants vers des pays aux conditions moins favorables, suscitant l’inquiétude des défenseurs des droits humains. Les réfugiés bénéficiant d’une protection temporaire, comme ceux fuyant des conflits, sont confrontés à des restrictions sur le regroupement familial et les aides sociales.
Dans la société, la politique divise. Les partis de droite, comme N-VA et Vlaams Belang, soutiennent les mesures, les jugeant nécessaires pour protéger les intérêts nationaux. Cependant, les partis de gauche, les Verts et des organisations comme Amnesty International critiquent le gouvernement, mettant en garde contre une crise humanitaire. La décision des Pays-Bas d’interdire le transfert de réfugiés masculins célibataires vers la Belgique en raison de « défaillances systémiques » dans le système d’accueil a terni la réputation internationale du pays, alimentant les critiques tant à l’intérieur qu’à l’extérieur.
Réaction de la communauté internationale
La nouvelle politique belge a attiré l’attention des organisations internationales et des pays voisins. Les principales réactions incluent :
- La Commission européenne et le Conseil de l’Europe ont exhorté la Belgique à respecter les droits humains et les obligations internationales, soulignant l’importance d’une approche humanitaire.
- Les Pays-Bas ont refusé de transférer des hommes célibataires vers la Belgique, invoquant un risque de traitement inhumain en raison du manque de logements et de protection juridique.
- Des organisations de défense des droits humains, comme Amnesty International et Human Rights Research Center, accusent la Belgique de créer une « crise autoprovoquée » en refusant d’augmenter la capacité des centres d’accueil.
- En Belgique, des activistes et des ONG, telles que Médecins Sans Frontières, continuent d’aider les réfugiés sans-abri malgré des ressources limitées.
- Les médias internationaux soulignent cette politique comme partie d’une tendance plus large au durcissement des règles migratoires en Europe.
Ces réactions mettent en lumière la complexité de la situation et la nécessité de trouver un équilibre entre les intérêts nationaux et les engagements humanitaires.
Alternatives et perspectives
Malgré le durcissement de la politique, des experts et défenseurs proposent des solutions alternatives à la crise migratoire :
- Mise en œuvre de la loi de 2015 sur la répartition des réfugiés dans les communes pour augmenter la capacité d’accueil.
- Investissements dans les infrastructures et amélioration des conditions dans les centres existants pour réduire la pression sur le système.
- Renforcement de la coopération au sein de l’UE, notamment via le Pacte sur la migration et l’asile prévu pour 2026, pour une répartition plus équitable des réfugiés.
- Augmentation du financement des ONG, qui jouent un rôle clé dans l’aide aux réfugiés, pour atténuer les impacts humanitaires.
- Développement de programmes d’intégration à long terme pour réduire les tensions sociales et faciliter l’adaptation des réfugiés.
L’avenir de la politique migratoire belge dépend de la capacité du gouvernement à concilier contrôle migratoire et normes humanitaires. Pour l’instant, le pays est sous pression, tant interne qu’externe.
Conclusion : La Belgique à la croisée des chemins
La nouvelle politique migratoire, entrée en vigueur en août 2025, reflète la tentative de la Belgique de gérer un système d’asile surchargé. Cependant, elle soulève de graves questions sur son humanité et sa conformité aux normes internationales. Alors que les autorités cherchent à reprendre le contrôle, les défenseurs des droits humains mettent en garde contre une hausse du sans-abrisme et une détérioration des conditions pour les réfugiés.
La Belgique parviendra-t-elle à équilibrer rigueur et compassion ? La réponse façonnera non seulement l’avenir des réfugiés, mais aussi la place du pays dans la communauté internationale. La politique continue de susciter des controverses, soulignant la complexité de la crise migratoire en Europe et la nécessité d’une approche globale.